Login

" Créer un jardin thérapeutique au coeur d'un hôpital psychiatrique "

« Au début, je me positionnais encore trop comme un horticulteur. J'avais trop d'objectifs. J'ai dû me remettre en question car nous sommes dans la thérapie, pas dans la productivité », analyse Alain Flandroit, devenu éducateur.

Horticulteur, Alain Flandroit est devenu éducateur au sein du centre hospitalier universitaire et psychiatrique Chêne aux Haies, en Belgique, où il a aménagé un lieu destiné aux patients.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Alain Flandroit a toujours eu de la suite dans les idées. Diplômé en horticulture, il a travaillé pendant plusieurs années dans des entreprises horticoles avant de prendre un poste comme veilleur de nuit au centre hospitalier universitaire et psychiatrique Chêne aux haies, près de Lille (59), à Mons-Borinage, en Belgique. Très vite, l'idée a germé de proposer un jardin potager aux patients : « Ce serait bien de leur apprendre à jardiner. » « Pourquoi ne pas devenir éducateur ? », lui répond un collègue. Avec une certaine appréhension, il s'est lancé, à l'âge de 35 ans, dans un cursus d'éducateur afin d'acquérir les compétences paramédicales nécessaires pour accompagner les patients. De retour à l'hôpital une fois diplômé, il a attendu qu'un poste se libère, tout en créant un jardinet au sein d'une unité. Mais son ambition ne s'est pas arrêtée là. Il s'est lancé dans la réalisation de ce qui est devenu le grand jardin de l'établissement, lieu où les patients des diverses unités se retrouvent régulièrement sous sa protection et celle d'autres soignants. Loin des objectifs de production, cet espace ancre les personnes hospitalisées dans l'espace et le temps. Les activités encouragent l'autonomie et la motivation.

L'enchaînement d'opportunités a permis de faire aboutir le projet. Un endroit dédié à l'hippothérapie ou équithérapie (médiation thérapeutique grâce aux chevaux devenus trop vieux), jugé trop onéreux par la direction, s'est retrouvé vacant. Il offrait un vaste terrain et un grand bâtiment. Deuxième aubaine, la Belfius Foundation, une fondation caritative lancée par une banque belge pour promouvoir en particulier le bien-être des patients hospitalisés, organisait le concours Colour Your Hospital. Alain Flandroit s'est inscrit et a décroché 10 000 euros qui ont servi à acheter des serres-tunnels, des équipements et des plantes. En 2013, le grand jardin et son potager sont devenus une réalité.

Pour Alain Flandroit, il est important que le jardin s'adapte aux patients, selon leurs capacités, leur mobilité, leurs connaissances et leurs envies. « Je supervise et je sers de support technique. J'ai un peu le rôle d'un professeur. Mais il ne s'agit pas de leur donner des tâches à exécuter. Il faut leur expliquer pourquoi. Il arrive également que les personnes hospitalisées m'apprennent des choses ou que l'une d'entre elles donne des conseils aux autres patients quand elle se sent en confiance. Quoi qu'il en soit, il y a un réel effet miroir. Les patients deviennent à leur tour soignants quand ils se chargent d'apporter de l'eau, des vitamines ou un tuteur aux plantes », raconte l'animateur.

Jardiner dans ce lieu particulier demande quelques précautions. Le soleil peut provoquer des réactions dangereuses en fonction de la prise de certains médicaments. Mais les solutions sont multiples, dont une tonnelle légère que l'éducateur peut déplacer pour que tous restent à l'ombre pendant qu'ils jardinent. « Il faut se renseigner sur les pathologies des patients. Il faut aussi les écouter et les protéger. Une dame qui avait fait une tentative de suicide était surprise qu'on la laisse utiliser des outils dangereux au jardin. Mais ici, elle se sentait bien. En règle générale, ils n'ont plus tout à fait l'impression d'être à l'hôpital. Les soignants savent que le jardin procure un effet positif et que les patients y sont plus calmes que dans les pavillons. » À l'heure de quitter ce lieu, tous se retrouvent autour d'un café qui clôture ce moment si particulier dans leur vie au sein de l'établissement.

Isabelle Boucq

Tous les soignants savent que le jardin apporte un effet positif et que les patients y sont plus calmes que dans les pavillons.

Grâce aux 10 000 euros qu'Alain Flandroit a remportés dans le cadre du concours Colour Your Hospital, des serres-tunnels, des équipements et des plantes ont été achetés.

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement